ND Victoires

27 juin 2017


Paris, Notre Dame des Victoires


Sermon pour les quinze jeunes prêtres


 
 

Moment avec les nouveaux jeunes prêtres du diocèse de Paris




Le cardinal Duval, lorsque j’étais en Algérie, a su que je m’occupais de jeunes dans les rues de Blida. Il m’a dit : « Un pied dans la rue.Un pied dans l’Eglise. Gardez bien les deux pieds où ils sont. » J’ai essayé de les maintenir où ils étaient. Grâce à l’Eglise qui m’a fait une confiance immense dans un métier très dur.


Le cardinal nous disait, quand on était séminaristes : « Faites bien l’eucharistie. »

Je me souviens de ces gestes nobles. Simples, longs, religieux. On dit maintenant « entrer dans l’eucharistie ». Alors les personnes pour lesquelles vous célébrerez sauront que c’est le plus grand moment de votre vie.


Pour la prédication, je vais vous raconter une histoire. Le curé de Blida était un ancien militaire.Il fallait que je lise mon sermon devant lui debout. Pour l’emmerder je me mettais assis. Il voulait que je le vouvoie, je le tutoyais.

J’avais fait un sermon sur la Sainte Vierge. Je lui lis. Il remarque une incorrection grammaticale. J’écoute attentivement.

C’était un samedi soir. A deux heures du matin, Mr Ben Abdalah,procureur de la république, sonne. Je lui demande ce qu’il faisait à cette heure. Il me dit : « Mr l’abbé, je viens vous annoncer que Mme Baujuan, 86 ans est morte depuis huit jours, et que nous l’avons retrouvée dans ses matières. Vous n’avez plus que 40 chrétiens, que faites vous des anciens de votre paroisse ? » J’en parle à mon curé. Il me dit : « On verra ça… »


Je monte en chaire. Je montre mon sermon, et je le laisse choir volontairement. Le curé était paniqué. Et je commence : « Mr Ben Abdalah, est venu à 2 heures du matin me dire que Mme Baujuan âgée de 86 ans était morte dans sa merde et sa pisse depuis 8 jours. Et il m’a posé cette question : « Que faites vous de vos anciens ? » Pas besoin de vous dire qu’à la sacristie, le curé m’a passé un savon. J’ai commencé à prêcher là. Ne parlez jamais à la tête des gens. Surtout si vous êtes des diplômés de haut niveau. Parlez au cœur des gens ! C’est ce que faisait le Christ. Et nous l’écoutons toujours avec passion.


Vous serez critiqués. C’est prévu. La pommade, vous devez vous en foutre complètement aussi. Mais les critiques négatives, gardez les et pensez y au calme. Je les note personnellement depuis 50 ans. C’est extrêmement précieux.


L’autre a toujours une vérité qui me manque. Je vis avec des jeunes non chrétiens, des athées, des musulmans, etc. J’achète une ruine et je la rebâtis avec des jeunes en imaginant trois étages. Mais nous n’avions plus d’argent pour les travaux. Un des jeunes me dit « Je suis pas catho, mais je sais que ton dieu aime les pauvres, et qu’il t’enverra l’oseille. » J’ai entendu cette prédication d’un môme non croyant comme une lumière de vérité. L’autre a toujours une vérité qui nous manque. Le plus petit notamment.


Au séminaire, on faisait du sport. Je voyais les prêtres un an plus tard, gros et gras.

Vous êtes encore filiformes pour la plupart… Mais on verra dans un an.Observez déjà le curé de votre paroisse ! Soignez votre cœur et votre corps. Faites du sport. Prenez du temps pour vous et pour Dieu. Depuis 40 ans je m’en vais 2 jours tous les 10 jours en retraite chez les moines. De façon impérative. Pas qu’une journée. Quand je suis au convent je vois les prêtres, je leur demande « d’où viens-tu ? » « De Paris, je suis là depuis 6h30, et je repars à 18h tout à l’heure… » Deux jours c’est important ! Deux jours de sommeil, de silence et de retrait par rapport à votre peuple. C’est vital.


Le cardinal Duval me disait aussi : « Le huitième sacrement est l’amitié sacerdotale ». Vous avez planché ensemble, étudié pendant des années. Gardez cette amitié. Gardez-la avec les vieux dinosaures de l’Eglise.Ils sont dans vos paroisses et ont besoin de dialoguer avec vous. Ils vous raconteront des tas de choses sur leur vie. Prenez patience, écoutez-les. Ils ont besoin de vous. Le cardinal Lustiger a dit un jour au cours d’une ordination : «Prêtres ne critiquez pas vos frères prêtres. » On a l’habitude de dire gentiment « c’est un saint prêtre » mais on le dépouille très rapidement de sa sainteté en disant les défauts qu’il a. Aimez les.


A votre porte il y a des mendiants. Je leur ai donné quelques sous toute à l’heure. Chaque fois que je vais dans une église des mendiants sont là.Je leur donne un ticket restaurant, un peu d’argent, ou une cigarette. J’essaie de regarder la personne. Voir le couleur de ses yeux pour ne pas donner comme à une borne kilométrique, et lui demander son prénom.

J’ai connu un clochard, Alain devant une église de Bretagne, j’ai été heureux de le présenter aux pratiquants. Il était depuis deux ans devant cette église mais personne ne connaissait son prénom. Il était très ému de savoir qu’il était nommé.


En suisse, dans une église très simple, au chœur immense, je présidais avec 12 prêtres pour des centaines de jeunes après une conférence. La foule était dense, et pour aller de la sacristie à l’autel, j’ai du me frayer un chemin difficilement. Après la communion, je reviens dans le choeur, qui était littéralement envahi. Deux mômes avaient même pris le fauteuil présidentiel. Et bizarrement il y avait 20cm vides devant l’autel. Juste la surface de mes santiags. C’était une suggestion pour me dire : « Prêtre, tu n’es pas grand-chose, tu es le serviteur des autres. Tu n’as droit, par la vertu merveilleuse de l’eucharistie, qu’à ces 20 cm pour tes deux pieds, simplement. Ta place est exactement celle-ci.


Don Bosco demandait à sa mère ce que c’était d’être prêtre. Elle lui adit : « C’est souffrir, souffrir, et souffrir. » J’ai lu cela quand j’avais 14 ans. J’ai pensé qu’elle s’était trompée ! Souffrir, c’est pas possible. Aujourd’hui je sais ce qu’est la souffrance. Tous les jours écoutez ceux qui souffrent. Ils sont nombreux dans cette société.

J’ai aimé que les jésuites ne donnent pas d’heure de prière. Tout est prière. Lisez votre bréviaire, mais si vous lisez un psaume magnifique, montez vers le ciel avec cette phrase.


J’ai connu les sept moines de Tibbhirine vivants. J’étais à 40 km, à Blida, et je voulais ramener un arbre pour ma ferme de Faucon. J’ai demandé à père Antoine quatre avant sa mort. Il a préféré me donner un lierre. Trois racines et trois feuilles ramenées dans ma piaule parisienne, que j’arrose vainement pendant quatre ans. Il ne poussait pas. Pas la moindre pousse. Mais en revenant d’une absence, je vois un mètre de lierre qui avait poussé tout à coup. Absent à nouveau, je découvre à mon retour la tige de lierre tout autour de mon bureau. Quand les moines ont été arrêts, le lierre a commencé à pousser.Quand ils sont morts, le lierre a entouré mon bureau. J’ai vu cela comme un sourire de Dieu. La prière c’est dur à se farcir. Mais elle est nécessaire.Elle doit jaillir. Comme disait sainte Thérèse : « La prière est un élan vers Dieu. » Ce lierre était le sourire de Dieu. Je l’ai planté à Faucon,il recouvre maintenant un mur entier de la maison.


J’ai assisté à sept JMJ. C’était extraordinaire pour mon cœur de prêtre. J’ai puisé un souffle incomparable. A Rome nous étions deux millions.Aux jeunes Jean-Paul II dit : « Vous êtes nombreux mais c’est le signe que vous êtes chacun important. Parce que vous êtes le signe du Seigneur. »


Après 52 ans de sacerdoce, c’est comme si j’avais deux jour de sacerdoce, avec vous. Je suis heureux d’être avec vous. Je bénis avant de vous quitter, ceux qui vous ont inspirés : une phrase, une personne, une image.Il y a de nombreux signes qui se rassemblent pour vous indiquer de devenir prêtre. Il y a d’abord vos parents, qui vous ont donné la lumière et la force.Je vous bénis avec affection, ainsi que tous ceux qui ont été les vecteurs de votre vocation.


Amen






























































































































































































































































































 
 
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